Mais bientôt les sectes chrétiennes se
divisèrent au sujet de Jésus. Malheur donc aux mécréants qui auront à affronter
le châtiment d’un jour terrible[1]
Si la
plupart des Églises chrétiennes croient en l’essence divine de Jésus, elles
s’opposent sur les rapports du Père au Fils et du Fils au Saint Esprit et, plus
généralement, sur la nature de cette divinité prétendue du Christ. La nature
divine de Jésus fut même le principal objet de controverses entre chrétiens, en
raison notamment des textes contradictoires à ce sujet. C’est au IVe
siècle que débutent ces controverses que les différents conciles chrétiens
tenteront d’éteindre en imposant le dogme orthodoxe sur cette question et en
excommuniant tous ceux qui oseront s’y opposer.
Lors du
premier de ces conciles, celui de Nicée (325), l’arianisme est condamné par les
évêques réunis sous le parrainage de Constantin, empereur romain païen qui
s’immiscera dans les discussions théologiques et pèsera sur les débats. Arius
et ses partisans considèrent Jésus-Christ comme une créature de rang
intermédiaire entre Dieu et l’homme, tandis que l’orthodoxie en fait l’égal du
Seigneur, consubstantiel au Père.
Au
second concile, celui de Constantinople (381), les évêques affirment la
divinité du Saint-Esprit, adoptant ainsi le dogme de la Trinité près de trois siècles après la disparition de
Jésus. Ils condamnent par là même Macédonius qui nie la divinité de la
troisième personne de la Trinité.
Le
troisième concile, celui d’Éphèse (431), affirme l’unité du Christ dès sa
conception et donne à Marie le titre de « Mère de Dieu ». Il
condamne Nestorius, patriarche de
Constantinople, qui enseigne que les deux natures coexistent en Christ, mais
sont séparées, et que Marie n’est que
la mère de Jésus.
Le
concile de Chalcédoine (451), le quatrième, réaffirme que Jésus est
à la fois Dieu et homme. Les Églises dites « monophysites » – Églises copte,
arménienne et syrienne d’Antioche ou jacobite – qui admettent une seule
nature divine du Christ et nient sa nature humaine, rejettent ce concile.
Mais le
pire est à venir avec le schisme de 1054, aboutissement de tensions séculaires
entre les Églises d’Orient et celle d’Occident. L’une des causes de la rupture
entre ce qui deviendra l’Église catholique et l’Église orthodoxe est encore la
nature de Jésus. Selon les orthodoxes, le Saint-Esprit procède du Père
uniquement, comme l’a défini le concile de Nicée. Mais en 809, Charlemagne
oblige le pape Léon III, chef de l’Église d’occident, à modifier le credo en
affirmant que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils[2].
On le
voit, la plupart de ces controverses concernent la nature du Christ. Le Coran
montre d’ailleurs que l’éclatement du christianisme est né des divergences des
chrétiens quant à la personne de Jésus : « Mais
bientôt les sectes chrétiennes se divisèrent au sujet de Jésus. Malheur donc
aux mécréants qui auront à affronter le châtiment d’un jour terrible. »[3] Pour
les musulmans, ces divisions s’expliquent par la divinisation de Jésus :
pour l’avoir élevé au rang de divinité, les chrétiens ont été égarés par Dieu
qui a suscité entre eux toutes ces discordes qui précisément concernent la
nature de Jésus. Le Très Haut dit : « Ceux
qui se disent chrétiens ont tourné le dos à une partie des enseignements
qu’ils ont reçus. Nous avons donc suscité entre eux haine et animosité jusqu’au
Jour de la résurrection. »[4]
La Réforme, qui donnera naissance au
protestantisme au XVIe siècle, achèvera de morceler le christianisme
formé aujourd’hui de centaines d’Églises qui s’excommunient les unes les
autres.