Mouhammad annoncé par Moïse

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Je leur susciterai du milieu de leurs frères un prophète comme toi, je mettrai mes paroles dans sa bouche, et il leur dira tout ce que je lui commanderai. (Deutéronome 18, 18)

S’il est un passage de l’Ancien Testament qui fit de longue date l’objet de controverses entre chrétiens et musulmans, c’est bien cette annonce de Deutéronome 18, 18 que les apologistes musulmans appliquent à Mouhammad pour les raisons suivantes :

Premièrement : les paroles « du milieu de leurs frères » désignent les Arabes, frères des Juifs, puisque les premiers descendent d’Ismaël, tandis que les seconds ont pour ancêtre Isaac, frère d’Ismaël et second fils d’Abraham. Cette formulation, typiquement sémite, peut surprendre mais elle revient encore dans l’Ancien Testament au sujet des fils d’Esaü dits « frères » des fils d’Israël, puisque Esaü est le frère d’Israël (Jacob), tous deux fils d’Isaac (Deut. 2, 4). Or, Dieu n’a suscité, parmi la descendance d’Ismaël, d’autre prophète que Mouhammad.

Deuxièmement : l’expression « comme toi » correspond bien à Mouhammad qui, comme Moïse, fut à la fois prophète-législateur et chef de son peuple. Elle ne s’applique pas, comme le pensent les chrétiens, à Jésus qui n’a pas apporté de nouvelle loi et ne fut pas le roi attendu par Israël. Cette expression ne s’applique pas non plus à Josué ou Samuel, comme l’affirment certains juifs, qui ne peuvent être comparés à Moïse, prophète dont la Bible dit : « Il n’a plus paru en Israël de prophète semblable à Moïse. » (Deutéronome 34, 10)  

Troisièmement : les paroles « Je mettrai mes paroles dans sa bouche, et il leur dira tout ce que je lui commanderai » conviennent parfaitement à Mouhammad qui, illettré, se contentait de répéter les paroles que Gabriel lui transmettait de la part de Dieu.

Les chrétiens réfutent en bloc ces arguments sous prétexte que le contexte exclut d’emblée tout prophète non juif et que l’expression « frères des fils d’Israël » désigne généralement dans la Bible les hébreux eux-mêmes. La force des arguments avancés par les chrétiens est indéniable. Il est pourtant un passage des Evangiles qui aurait dû intriguer les hommes d’Eglise mais qui ne semble pas avoir éveillé leur attention, à moins qu’ils ne l’aient sciemment ignoré compte tenu de ses implications. Il s’agit du passage qui relate l’interrogatoire imposé par les pharisiens à Jean Baptiste. « Voici le témoignage de Jean, lorsque les Juifs envoyèrent de Jérusalem des sacrificateurs et des Lévites, pour lui demander : Toi, qui es-tu ? Il déclara, et ne le nia point, il déclara qu’il n’était pas le Christ. Et ils lui demandèrent : Quoi donc ? Es-tu Elie ? Et il dit : Je ne le suis point. Es-tu le prophète ? Et il répondit : Non. » (Jean 1, 19-21) Un peu plus loin, les pharisiens lui font ce reproche : « Pourquoi donc baptises-tu, si tu n’es pas le Christ, ni Elie, ni le prophète ? » (Jean 1, 25) De ces deux passages, l’on déduit d’une part que les Ecritures annoncent la venue d’un prophète, prophète connu et d’un rang particulier, comme l’indique l’utilisation de l’article défini « le », et d’autre part que ce prophète est différent du Christ. Or, de nombreux commentateurs chrétiens, à l’image d’Origène, établissent un lien entre le prophète annoncé par Moïse en Deutéronome 18, 18 et celui attendu par les juifs à l’époque de Jésus (voir La chaîne d’or (Catena aurea), saint Thomas d’Aquin, traduction de l’Abbé J-M Peronne, Louis Vivès éditeur, 1868).

Bien que l’on ne puisse assimiler avec certitude Mouhammad au prophète annoncé par Moïse, nul doute que les juifs attendaient encore un prophète différent du Messie au premier siècle de l’ère chrétienne. Or, jusqu’à ce jour, nul n’est venu réaliser cette prophétie parmi les juifs. Le seul homme qui, après Jésus, s’est déclaré prophète et a fondé une religion en se réclamant du Dieu d’Abraham est le prophète de l’islam.